Deirdre Trenarn (L’histoire de Deirdre). Prologue et première journée

 


Prologue.

J’écris cette note, cerné par la mort, la peur et le désespoir. De cruels ennemis sont sur moi et me pourchassent. Je n'aurais jamais cru devoir dire ennemis concernant le Roi et ma mère. 

Je ne sais pas qui tu seras Lecteur. Si tu crois en Eru dis-toi que j'y crois aussi et que ce témoignage n'est pas la vérité mais une vérité. Un manuscrit de démons (ou de sorcières) dans lequel dans le feuillage on aperçoit comment ils voient les Quendi et les Atani. Celle qui m'a livré la matière de ce manuscrit aurait mérité une meilleure vie et nous devons regarder le miroir qu'elle nous tend bien qu'il nous en coûte. Je vais reprendre ma chevauchée à travers les collines, enterrer ce manuscrit et les entraîner sur une fausse piste. Je chevauche dans ces collines tel mon grand-père Eomund. Il fut un chasseur et je suis une proie c'est toute la différence. Les sages disent que c'est préférable mais j'ai peur.

Je ne sais plus qui sont mes ennemis, ce qui est bien ou mal mais je vais faire ce que fait un chevalier : tenir ferme à ce qui est noble. 

Salutations

Varamar, archiviste de l'ordre du Grand Livre Rouge et chevalier de l'Arbre 


« Give me your trust, said the Aes Sedai. 

On my shoulders I support the sky. 

Trust me to know and to do what is best, 

And I will take care of the rest. 

But trust is the color of a dark seed growing. Trust is the color of a heart's blood flowing. Trust is the color of a soul's last breath. Trust is the color of death. 

Give me your trust, said the queen on her throne, for I must bear the burden all alone. 

Trust me to lead and to judge and to rule, and no man will think you a fool.

 But trust is the sound of the grave-dog's bark. Trust is the sound of betrayal in the dark. Trust is the sound of a soul's last breath. Trust is the sound of death. 

Give me your trust, said the King on high 

A promise of peaceful and prosperous lives 

Trust my compassion will reign pure and true 

A kingdom of glory and joy through and through But trust is the scent of a burning village Trust is the scent from spoils and pillage trust is the scent of a souls last breath trust is the scent of death. 

Give us your trust said the lady and lord to grant you protection and give to the poor 

trust us while guarding your lands have no fear for the life of the common folk while we are near 

But trust is the touch of a blade to the throat Trust is the touch of the hang man's rope trust is the touch of a souls last breath trust is the touch of death. 

Give me your trust said the Love of your life 

To have and to hold, in joy and in strife 

Trust me to love you with heart and with soul 

For better or worse, till death take it's toll 

But trust is the taste of a thee unfaithful's lie Trust is the taste of poisoned wine Trust is the taste of a soul's last breath Trust is the taste of death. »


Robert Jordan 




Deirdre Trenarn (L’histoire de Deirdre).


J’avançais courbé sur mon cheval. Il faisait un temps où autrefois les paysans se seraient calfeutrés dans leurs masures, craignant un raid de yrch, de garaf ou d'Enedwaith. Un temps pour les héros. Mais aujourd’hui il n’y avait plus de yrch, de garaf et presque plus d'Enedwaith. Plus de place pour les héros ou peut être que si. A toi d’en juger lecteur. Le commandant Aldor me reçut. Il se tordait les mains d’obséquiété et je lui dis ce pour quoi j’étais venu.

Je fus conduit par un garde à la cellule. Il l’ouvrit et pour la première fois, je vis Deirdre. Je la vis en haillons, ses longs cheveux noirs emmêlés pendaient mollement et avec des plaies. Mais quand elle leva la tête, Ses yeux brillaient comme un éclair au cœur d’un nuage noir et je compris ce que devait être dans les jours anciens la beauté de Tinuviel. Même les Quendi que j’avais rencontré et la reine elle-même, Undómiel n’avait pas dans ses yeux gris une flamme semblable à celle de Deirdre. La fermeture de la porte par le garde me tira de ma stupeur et je commençais gauchement par lui demander son nom. Sa voix était sèche et éraillée mais restait fière et moqueuse 

« Pourquoi un atani (j’eus un instant de surprise en l’entendant parler la langue ancienne et noble) voudrait savoir qui il va torturer et pourquoi lui dirais-je ? » 

« Je n’ai nulle intention de vous torturer. Je suis un archiviste de l’ordre du Grand Livre Rouge et bien que vous soyez une ennemie, je suis là pour recueillir votre témoignage avant votre mort »

« Comme c’est noble de votre part de me proposer des tortures non plus physiques mais psychologiques. Tout cela pour obtenir un récit servant d’appendice « maléfique » à votre si précieux Livre Rouge ou pour distraire une noble atanie que vous courtisez ? Contre ma liberté je l’accepterais. »

J’étais irrité qu’elle ose mettre ma parole en doute et vaguement honteux car je n’avais jusque-là jamais été confronté à des prisonniers ennemis torturés. Bien sûr que je savais que la vision d’Elessar s’imposait parfois de manière forte mais le savoir et y être confronté sont deux choses fort différentes. Et puis les Enedwaith étaient humains au contraire des yrch. Et son regard me vrillait toujours. Son érudition m’intriguait aussi et j’étais désireux de lui prouver que les archivistes servent la Vérité. 

« Je ne sers que la Vérité lui dis-je et ne peux vous promettre la liberté. Mais je vous promets la fin de vos tortures, une mort sans douleur et que je garantirais que ce que vous écrirez sera rendu public »

Elle eut un léger sourire : « Vous mentez probablement mais après tout je n’ai rien d’autre à faire et plus rien à perdre. J’aurais juste une demande : Pourrais- je avoir des peintures ? Quand je mourrais, j’aimerais mourir avec la marque de ma maison ? ». Je lui promis tout en notant que le commandant n’avait probablement pas tort sur son appartenance ancienne aux Vierges de la lance. « Comment voulez-vous commencer ? » me dit –elle d’un ton plus calme

Je lui répondis que je reviendrais demain matin prêt à tout noter. 

Le lendemain, je rentrais de nouveau dans sa cellule. Elle avait reçu une nourriture correcte et j’avais précisé que quiconque la maltraitait subirait le châtiment du fer. Je fus surpris par sa beauté et son maintien et une fois de plus je la comparais à la fille des fleurs, Tinuviel. Ses cheveux noirs rebelles retombaient sur sa peau brune qui tranchait avec la robe rouge de bure des condamnés à mort.

Je m’installais avec mon écritoire. Elle me dit 

« Que voulez-vous savoir ? »

« Comment avez-vous été mêlée à la guerre de la victoire ? »

Et elle me raconta ce que, lecteur inconnu, je t’écris ici.


« Lancelot regarda longuement le merveilleux spectacle du tournoi. Il lui sembla que les Noirs cédaient du terrain, qu’ils avaient perdu beaucoup de monde, et qu’ils allaient être vaincus. Il décida d’aller sur-le-champ les aider. Il entre au pré, baisse sa lance... Le premier cavalier blanc qu’il rencontre, il le renverse, lui et son cheval ; en abat un second, mais sa lance se brise ; il tire l’épée et commence à parcourir la lice en frappant à droite et à gauche, avec une puissance souveraine. A ce moment les spectateurs étaient unanimes à lui accorder le prix du tournoi. Cependant, peu à peu, Lancelot s’aperçoit que les Blancs ne s’enfuient plus devant lui : repoussés, ils reviennent, ils reçoivent ses coups avec une prodigieuse endurance. Il frappe, frappe encore, de toute sa vigueur, comme un charpentier sur une pièce de bois, et ceux qu’il atteint ne semblent pas s’en ressentir. ……. Ouvre les yeux, c’est toute ta vie qui vient de se dérouler devant toi : ce tournoi en était l’image symbolique. Le parti aux armes noires, que tu as d’abord soutenu en téméraire, c’était celui de Satan, le seigneur de tes années de jeunesse. Et les Blancs, dont l’obstination a eu raison de toi, ce sont les sages, les solitaires, les patients serviteurs de l’Esprit, à récemment, tu as fini par te confier. Heureuse défaite ! »  La Quête du Saint Graal

Attribuée à Gautier Map (XIIIe siècle)

I narn i adaneth Gwathuirim (le conte de la femme sauvage)


Je suis née dans les terres du pays Libre, le Ppobl ddim , le Lië Léra. Celles que vous appelez les Marches car vous y marchez contre le Peuple Libre. Les marches où vous nous contrôlez. Nos terres dont je sens encore le vent jouer avec ma chevelure et les collines et les vallées herbeuses. Les jours dorés et les nuits argentées. Ces terres quasi vides actuellement et en voie de « pacification ». Même ici dans ce cachot, je sens l’air du Dunland. J’appartiens par ma mère à la Maison de la Lance et par mon père au clan des llygoden. La maison signifie ce que nous faisons dans le peuple Libre et le clan les gens avec qui il est bon de se marier et avec qui nous vivons sauf lors des rencontres annuelles des Maisons. Désobéir signifie que l’on devient sans clan ou sans Maison et il n’y a pas de pire châtiment. Sans clan ou sans maison un membre du Peuple Libre ne peut que choisir de rejoindre le culte de Thu, de partir avec ceux du Nord ou de devenir un chien couché des Forgoill. Je me rappelle des longs cheveux noirs de ma mère et de son sourire rare. Elle était fière, intelligente et froide comme une lame dégainée. Mon père était aussi un homme silencieux. Il était potier de la maison de l’Art et je le vois encore pétrir la terre Ocre. Et puis, il y avait ma sœur Fiona ; Elle avait 25 lunes de plus que moi. ? Ma mère et mon père ne s’occupèrent guère de moi et ce fut elle qui m’éleva, qui me surveillait pour éviter que je tombe dans le ruisseau quand j’allais cueillir des fleurs et qui me couchait en me chantant des berceuses de sa voix mélodieuse. Sa voix était aussi belle que celle d’un rossignol chantant, ses yeux gris comme la lumière des étoiles et ses cheveux étaient noirs comme une nuit bienfaisante et apaisante. Quand elle parlait elle était comme une rosée sur un visage assoiffé et craquelé, comme une ombre dissimulant une guerrière de la Maison de la Lance à une traque, comme les étoiles telles que le Roi de la Nuit les fit d’après le culte de Thu. Un de vos poètes a chanté un amour de temps anciens entre une blanche-démone et un Forgoill en ses termes « comme un rayon de soleil sur un arbre, comme le murmure des eaux limpides, comme les astres loin des radieuses fumées, telle était sa radieuse beauté et son visage était tout de lumière ». Je me rappelle de ces termes car Amirg a repris ces vers pour dire son amour à ma sœur. Voilà ce qu’était Fiona. 

A l’âge de 6 ans je fus emmenée par ma mère aux réunions clandestines de la Maison de la mémoire. Là j’appris l’histoire de notre peuple. Comment le Peuple Libre grandit et prospéra sur la terre sacrée libre et heureux après le départ du gros des Blancs-démons et des Hedain. Comment les Hedain , les hommes de fer vinrent dans de grands bateaux et comment ils firent semblant de se montrer amicaux apportant de grands présents comme de nouvelles méthodes pour produire la nourriture. Comment, ils apportèrent également l’eau de feu qui affaiblit le peuple. Comment, ceux -ci revinrent pour dresser de grandes forteresses soumettant le peuple et le réduisant au tribut. Comment, certains du peuple se rebellèrent avec l’aide de Thu qui était envoyé par le Roi de la Nuit et que l’on surnommait Annatar, le Dispensateur. Comment, les Hedain matèrent le peuple par le fer et par le feu. Comment, ils chassèrent le peuple libre pour le réduire en esclavage et le sacrifier à ses dieux sombres dans leurs autels monstrueux. J’appris que leur dernier tyran vint en personne et captura Thu. Mais alors que tout semblait perdu, Thu arriva à s’infiltrer dans les bonnes grâces des Hedain, à rompre la connexion qu’ils avaient avec leurs dieux et comment leur île maléfique fut engloutie. Le peuple libre était heureux car nous nous libérâmes et nous détruisîmes les forteresses des Hedain isolés. Mais certains avaient survécu. Ils arrivèrent et reformèrent leurs bases et des royaumes. Thu les défia et il y eut une grande bataille entre les Hedain et les Blancs Démons d’un côté et de l’autre les forces de Thu, ses snagas innombrables, ses torogs puissants et de nombreux hommes. Certains du peuple y allèrent notamment parmi les adeptes du peuple de Thu. D’autres n’y allèrent pas car nous nous méfions de Thu qui était certes sage mais avait son vouloir propre qui ne coïncidait pas forcément avec celui du Peuple. Enfin, une partie du peuple fut victime d’un sort proféré par l’un des chefs des Hedain grâce à la magie des blancs-démons et ces gens du peuple eurent un sort pire que la mort. Je vois que vous en avez entendu parler. Moi aussi j’ai réussi à lire les ballades » de vos héraults et de vos ménestrels. Pour tout vous dire, même s’ils se sont battus contre le Peuple durant la guerre de la Désolation, je suis heureuse qu’ils aient enfin été libérés de leur sort. 

Ainsi s’acheva notre premier entretien.


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